Cette loi, dont l'AFP a pu consulter une copie, réclame également des indemnisations et affirme la "responsabilité juridique" de la France pour son passé colonial en Algérie et les tragédies qui en ont découlé.
Si elle est adoptée, sa portée sera avant tout symbolique. Sur le plan pratique, son impact sur d'éventuelles compensations semble limité.
Le président de l'Assemblée populaire nationale, Brahim Boughali, a présenté ce vote comme "un acte souverain par excellence". Pour lui, c'est "un message clair, à l'intérieur comme à l'extérieur : la mémoire nationale algérienne n'est ni effaçable, ni négociable."
Du côté français, on reste prudent. Interrogé la semaine dernière, le porte-parole du Quai d'Orsay, Pascal Confavreux, s'est abstenu de tout commentaire, évoquant simplement des "débats politiques qui se passent dans les pays étrangers."
Les experts soulignent le caractère surtout politique de cette démarche. Hosni Kitouni, chercheur à l'université d'Exeter, explique que "juridiquement, cette loi n'a aucune portée internationale et ne peut donc obliger la France." Mais il reconnaît que "sa portée politique et symbolique est importante : elle marque un moment de rupture dans le rapport mémoriel avec la France."
La question coloniale reste en effet une épine persistante entre les deux pays. La conquête de l'Algérie à partir de 1830 fut marquée par des violences massives, la destruction des structures locales et de vastes déportations. Une longue guerre d'indépendance (1954-1962) a ensuite ensanglanté le territoire, faisant, selon les sources, entre 500 000 et 1,5 million de victimes algériennes.
En 2017, Emmanuel Macron, alors candidat, avait qualifié la colonisation de "crime contre l'humanité" et évoqué la nécessité de présenter des excuses. Une fois élu, après le rapport Stora en 2021, il a promis des "actes symboliques" pour apaiser les mémoires, mais en excluant cette fois les excuses officielles. Des propos ultérieurs, remettant en cause l'existence d'une nation algérienne avant la colonisation, avaient provoqué l'indignation à Alger.
Ce vote intervient dans un contexte déjà tendu, depuis que la France a reconnu, à l'été 2024, un plan d'autonomie marocain pour le Sahara occidental. D'autres incidents, comme la condamnation de l'écrivain franco-algérien Boualem Sansal – finalement gracié après une intervention allemande –, n'ont fait qu'envenimer la situation.
L'Algérie réclame justice pour l'héritage de la colonisation. Un projet de loi actuellement en discussion affirme le droit du pays à une "indemnisation complète et équitable" pour les préjudices subis. Parmi les demandes centrales figure la décontamination par la France des sites du Sahara où 17 essais nucléaires ont été menés entre 1960 et 1966.
Le texte exige également la restitution des biens emportés, notamment les archives nationales. Enfin, il prévoit des sanctions pénales pour quiconque ferait l'apologie de la colonisation ou nierait son caractère criminel. Si des propositions similaires ont déjà échoué par le passé, ce projet relance un débat profond sur la mémoire et la réparation.
