Imaginez un patron qui, au moment de vendre l'entreprise qu'il dirige, pense d'abord à ceux qui l'ont fait vivre. C'est l'histoire de Graham Walker, PDG de Fibrebond, une PME familiale de Louisiane spécialisée dans les équipements électriques. Alors qu'il vient de conclure la vente de sa société pour 1,7 milliard de dollars au géant Eaton, il a posé une condition non négociable : que 240 millions de dollars – soit 15% du montant de la vente – soient redistribués aux 540 salariés.
Pour ces employés, dont beaucoup sont installés à Minden, une petite ville de 12 000 habitants, cela représente environ 443 000 dollars chacun, versés sur cinq ans à condition de rester dans l'entreprise. Une somme qui change des vies. « Près d’un quart de milliard de dollars entre les mains de ceux qui ont construit cette réussite, ça me semblait simplement juste », explique Graham Walker, 46 ans, au Wall Street Journal.
Derrière ce geste, il y a une longue histoire de résilience. Fondée en 1982, Fibrebond a traversé des épreuves difficiles : un incendie qui a ravagé l'usine en 1998, puis la crise internet des années 2000 qui a fait fondre les effectifs. Mais depuis quelques années, portée par la demande croissante en équipements pour data centers et intelligence artificielle, l'entreprise a rebondi avec force, multipliant ses ventes par cinq.
Aujourd'hui, la prime commence déjà à faire son effet. Lesia Key, 51 ans, a pu rembourser son prêt immobilier et ouvrir la boutique de vêtements dont elle rêvait. « Je peux vraiment vivre, maintenant. Je suis tellement reconnaissante », confie-t-elle. D'autres ont acheté une nouvelle voiture, ou mis de côté pour les études de leurs enfants.
Graham Walker, lui, quittera ses fonctions fin janvier. Mais en partant, il laisse bien plus qu'une entreprise vendue : il offre à toute une communauté les moyens de se projeter, et écrit une belle page d'économie à visage humain. Une façon rare et précieuse de dire merci.